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Le Bistrot de la Garce
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9 mars 2009

JE ME SOUVIENS...

Une fois n'est pas coutume, je voudrais vous parler de Max. Max a sonné à notre porte un soir, il y a quelques mois. D'abord doucement, puis avec insistance. J'ai regardé dans l'oeilleton et j'ai aperçu une silhouette que je ne connaissais pas. Je n'ai pas répondu car j'ai pas d'argent à donner aux gens de passage. Puis comme il restait scotché à la sonnette, je lui ai demandé à travers la porte ce qu'il cherchait. J'ai alors compris que la personne qu'il espérait voir, ce n'était pas moi. J'ai tenté de lui expliquer qu'il faisait erreur. Il a baragouiné quelques mots que je n'ai pas cherché à entendre et suis repartie vaquer à mes occupations. Pas le temps de lui dire derrière ma forteresse que j'avais un George à m'occuper ainsi que des ados à contenter.
Environ 30 minutes plus tard, la sonnette a de nouveau retenti. C'était toujours lui. En regardant plus attentivement, je vis qu'il avait une boîte de gâteaux et une bouteille dans les mains. Il semblait bel et bien perdu.

Je suis allée chercher mon George et nous avons ouvert la porte. Nous avons compris, immédiatement. Max était invité chez une amie, Sylvie, il était sorti acheter des boissons et des gâteaux et ne se rappelait plus du chemin inverse. Il se souvenait seulement de 2 choses : il devait aller au bâtiment d'angle et grimper au 8ème étage. Sauf que dans notre quartier, des bâtiments identiques qui font un angle il en existe pas moins de 14. C'était donc chez nous qu'il avait atterri.

Nous lui avons demandé le nom de son amie et s'il avait un numéro de téléphone auquel cas, nous pourrions tenter de la joindre. Max a sorti une multitude de sacs en plastic de ses poches avec d'innombrables morceaux de papier sur lesquels figuraient des noms, des numéros ... mais pas celui de Sylvie. Il était désemparé et n'arrêtait pas de s'excuser. Il parvint malgré tout à se remémorer le nom de famille de Sylvie.

Mon George se précipita sur Internet en souhaitant qu'elle soit dans les pages blanches, et je discutais avec Max. Je peux vous assurer que ce soir là, mon palier n'a plus eu aucun secret pour moi. Max se confondait en excuses et me racontait qu'il avait perdu la mémoire et qu'il n'y avait rien de plus affreux. J'aperçus au milieu des papiers qu'il passait et repassait dans ses mains, une convocation des hôpitaux de Paris. Je lui demandais s'il sortait tout juste de l'hôpital. Il me dévisagea et je vis dans son regard à la fois une présence et une distance. Il commença à me dire des bribes de mots : long séjour, plus de point de repère, plus de centre de gravité...

Pendant ce temps George avait trouvé Sylvie, qui finalement n'habitait pas très loin de chez nous. Nous expliquâmes à Max comment il devait faire pour se rendre chez elle. Son visage s'assombrit puis se ferma. Il n'avait aucun moyen de différencier la droite de la gauche, incapable de savoir dans quel sens aller, il avait grimpé nos 8 étages à pieds, ne sachant utiliser l'ascenseur. George décida d'appeler Sylvie afin qu'elle vienne à sa rencontre. Durant ce laps de temps, Max me raconta son drame : il vivait à Toulon avec une jeune femme dont il était très amoureux. Un soir rentrant chez eux, il la trouva avec 4 copains qu'il ne connaissait pas et qui avaient descendu quelques bières. Demandant des explications, le ton était monté, et les 4 l'avaient saisi pour le jeter par la fenêtre du 3ème étage. Il s'en était "sorti". Touché physiquement et détruit psychologiquement...

Je l'accompagnais au rez de chaussée et j'attendis à ses côtés Sylvie. Lorsqu'il l'aperçut, on aurait dit un enfant, son visage s'illumina, il était sauvé. Elle me remercia et ils s'éloignèrent.

Je les ai revus 2 semaines après, au hasard d'un coin de rue, elle m'arrêta pour me parler. Max ne m'a pas reconnu et il ne s'est pas rappelé cet épisode. Elle m'expliqua que c'était bien son histoire, Max a 35 ans. Il a la mémoire détruite même si quelquefois 3 ou 4 minutes de son passé lui reviennent, le reste du temps c'est un combat permanent pour retrouver un semblant de survie.

Cela m'a renvoyé au magnifique film de Nick Cassavettes The Notebook, qui raconte la superbe histoire d'amour d'Allie et de Noah. Allie est atteinte de la maladie d'Alzheimer et vit dans une maison de retraite. Chaque jour Noah vient lui lire le même livre. Il s'agit du carnet où Allie a écrit sa vie lorsqu'elle sut qu'elle était malade. Pour ne pas oublier les sentiments qu'elle a pour Noah, elle a tout tout noté et Noah lui relit ses notes inlassablement. Nous remontons toute leur vie et toute leur histoire d'amour si intense jusqu'à ce que la mémoire finisse par les séparer.

Voilà, c'était mon billet sensible. Je me dis avec tout ça que finalement les petites broutilles et les tracas de la vie de couple, c'est peanuts à côté, et qu'il faut profiter de chaque jour avec l'autre, c'est pas mon George qui me contredira...

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Commentaires
L
@ C encore moi : tu es ici chez toi, tu fais partie du décor non ? ;))
C
Je n'ai pas que de jolis souvenirs ... mais de doux et beaux depuis peu ressurgissent mais chuuut ! Merci de m'autoriser à être ici et ce billet il dit tout et rien pour chacun d'entre nous. Je t'embrasse.
M
Merci, merci, merci.... Ne le dis à personne, mais j'ai l'impression qu'il y en a une qui voudrait bien faire la 4ème! Sympa non?
L
moi j'aime bien les pots de colle, surtout quand j'étais jeune les pots qu'on reniflait car ça sentait l'amande :))
K
Je veux bien être la troisième à t'entourrer parce que je reste aussi positive. Quoi je suis pot de colle ?<br /> Ben oui, c'était mon surnom gamine :-)
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